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Extinction nocturne : la marge de manoeuvre

La logique de l’extinction nocturne 

Depuis 1697, date où la France a publié le premier texte de loi mettant en place des lampes à bougies dans les rues, le service d’éclairage public a toujours visé à apporter de la lumière pour sécuriser les déplacements à toute heure de la nuit. L’usage était de fait dédié aux piétons qui étaient ainsi sécurisés. L’éclairage avat un effet dissuasif contre les agressions, en permettant l’anticipation et l’identification de dangers.
L’arrivée de véhicules, d’abord à chevaux, puis de plus en plus rapides, en quantité croissante, a transféré la question de sécurité sur l’interaction piétons <-> véhicules.

Des normes sont apparues pour encadrer l’éclairage urbain. Désormais elles prennent compte des densités d’éclairage minimales requises en fonction de la densité de véhicules et leur vitesse moyenne. ( norme EN 13201 au début des années 2000). 

Dans la norme utilisée en France, l’Eclairage Public est dimensionné surtout pour l’intérêt des conducteurs (uniformité, mesure sur la chaussée, etc) : L’éclairage est « vehicle centric ».

L’arrivée des LEDs, dont le rendement s’améliore d’année en année, permet de remplacer l’éclairage Sodium « jaune » par une lumière blanche plus naturelle, tout en consommant 2x moins. Mais la LED présente un spectre blanc contenant une composante bleutée importante, plus déstabilisante et impactante pour la faune que l’éclairage sodium qu’elle remplace.

Les associations environnementales, telle l’ANPCEN, se sont saisies relativement tôt des dérives possibles de la modernisation de l’éclairage public à LED. Avec un travail de réflexion et d’étude reposant sur un réseau d’expert scientifiques reconnus, elles ont fait infléchir une tendance néfaste pour nos écosystèmes. Dans son cas, elle participe activement à la norme AFNOR EN13201 relative à la qualité et performance d’éclairage public.

L’arrêté sur la pollution lumineuse de décembre 2018 est ainsi le premier texte de loi inversant la tendance à éclairer plus pour plus de sécurité. Il met un cadre à l’usage croissant des luminaires à LEDs dont la plus faible consommation pourrait inciter à éclairer massivement.

A partir de 2020, les confinements ont accéléré drastiquement la tendance à stopper l’éclairage public en cœur de nuit, typiquement entre 23H30 et 5H30. L’éclairage n’est plus exploité que 1910 Heures par an au lieu de 4100 Heures à plein usage. 

Conséquence : Les anciens éclairage sodium voient leur ampoules doubler de durée de vie. Le coût d’énergie est réduit de 54% de facto. Cela permet de repousser le remplacement des anciens luminaires par des LEDs ou de diviser aussi par 2 la consommation de ces derniers.

Si financièrement une telle réduction de coût d’exploitation est un acte de bonne gestion pour la collectivité, ce n’est pas la méthode la plus écologique et loin d’être aussi sécuritaire que certains l’ont annoncé.

Les constructeurs de composants d’éclairage LED ont prévu des fonctions pour une gestion plus « propre » de ce nouvel éclairage. Un travail de fond de l’industrie d’éclairage a abouti à une deuxième génération de dispositif d’éclairage public depuis 2019 que les collectivités méconnaissent souvent. Désormais l’éclairage sait mesurer sur site sa consommation, diagnostiquer le vieillissement des LEDs, identifier les surtentions du réseau éléctrique, régler finement l’intensité d’éclairage en fonction de l’heure, etc. Le luminaire gère son cycle de vie pour l’étendre au maximum et éviter des remplacements de parc systématiques, comme cela se pratique pour les lampes sodium, ce qui relève du cycle d’obsolescence programmée.

De nombreux facteurs sont à connaitre pour choisir un éclairage vraiment écologique. Les facteurs de coûts et satisfaction des citoyens sont les points de départs pour identifier les voies de modernisation possible de sa ville. 

Les critères à mettre en balance sont : 

  1. Energies
  2. Impact écologique sur le biodiversité & pollution lumineuse
  3. Sécurité mesurée
  4. Sécurité ressentie
  5. Confort et bien être
  6. Impact citoyen et image de la ville.

 1) Energies : Les réductions

La connaissance des valeurs réelles obtenues avec les différentes méthodes de gestion d’éclairage est le point de départ pour identifier l’impact des actions envisageables : 

  • Économiquement, un luminaire à lampe Sodium de 100 Watt coûte 56.10€ de consommation par an (451Kwh à 0.1244€ du KWh hors abonnement). 
  • Avec extinction lumineuse sa consommation revient à 26.13€/an.
  • Un luminaire LED équivalent, performant, demande 55 Watt pour la même densité lumineuse moyenne au sol. Soit 28€ de consommation par an et 13€ avec extinction 6H par nuit.
  • Le même luminaire LED équipé d’un capteur de mouvement avancé (type Kara avec différentiation piétons/vélo/auto ) consomme typiquement 9.8€ sans extinction nocturne. Si le capteur est simple détecteur de mouvement infrarouge ou radar, la consommation monte à 20€ (30% d’économie).

L’extinction nocturne est donc une méthode efficace de réduction de coût, mais reste 32% plus consommatrice que l’éclairage adaptatif « human centric ».

Nota : Ces prix sont à majorer sur la durée d’usage réel du luminaire : L’Ademe prévoit un prix d’énergie à 0.15 Euro dans 10 ans. Le prix de l’abonnement compteur est également à répercuter ( env +20% sur la facture annuelle). Dans 10 ans un luminaire LED 55 Watt avec extinction nocturne coûtera 19€ par an, abonnement inclu.


2) Impact écologique sur la biodiversité & pollution lumineuse

Étrangement, l’éclairage historique au Sodium présente un spectre lumineux tirant sur le jaune avec des composantes orangées et peu/pas de composantes bleues. Il se rapproche du spectre du soleil lors du coucher, qui est annonciateur de la nuit.

 

 

L’éclairage Sodium était « éco friendly » et favorable à l’endormissement. 

Le passage à l’éclairage LED est contradictoire à la notion de protection de la biodiversité et de la santé publique. C’est ce facteur clef qui est mal estimé par les collectivités.  

Pour l’homme :

Le spectre sans bleu, tirant sur le rouge-orangé, démarre la génération de mélatonine facilitant le sommeil. L’INSERM ( entité scientifique rattachée au ministère de la santé), détaille sur son site la chronobiologie humaine et comment des cellules dédiées de l’oeil, les cellules ganglionnaires à mélanopsine, permettent la synchronisation de nos cycles physiologiques jours/nuit. En particulier ils notent : « L’effet de la lumière sur l’horloge dépend aussi de son spectre (sa couleur) et sera d’autant plus important qu’il sera riche en longueurs d’ondes bleues (~460–500 nm). « 

D’ailleurs, aux USA, l’Association des Médecins Américain, l’AMA,  s’est saisie du sujet et est allée plus loin en écrivant dans sa recommandation aux collectivités que l’éclairage à LED est nocif pour la santé des humain. 

Leur analyse officielle, communiquée au gouvernement :

«  It is estimated that white LED lamps have five times greater impact on circadian sleep rhythms than conventional street lamps. Recent large surveys found that brighter residential nighttime lighting is associated with reduced sleep times, dissatisfaction with sleep quality, excessive sleepiness, impaired daytime functioning and obesity.« 

Leur rapport officiel se termine par  : 

RECOMMENDATIONS 

The Council on Science and Public Health recommends that the following statements be adopted, and the remainder of the report filed. 

1. That our American Medical Association (AMA) support the proper conversion to  community-based Light Emitting Diode (LED) lighting, which reduces energy 41 consumption and decreases the use of fossil fuels. (New HOD Policy) 

2. That our AMA encourage minimizing and controlling blue-rich environmental lighting by  using the lowest emission of blue light possible to reduce glare. (New HOD Policy) 

3. That our AMA encourage the use of 3000K or lower lighting for outdoor installations such as roadways. All LED lighting should be properly shielded to minimize glare and detrimental human and environmental effects, and consideration should be given to utilize the ability of LED lighting to be dimmed for off-peak time periods. (New HOD Policy)

 

Pour la faune :

De nombreuses études existent sur la perception des insectes. L’une des plus connues, celle de Pawson & Bader de 2014 , effectue le simple constat que des panneaux d’éclairage à LED attirent 48% d’insectes de plus que l’éclairage Sodium. Ces études sont réalisées avec des LEDs blanches de premières génération, présentant toute des rayonnements bleus important (toutes les LEDs il y a 8 ans avaient des phosphores ne tenant pas en compte cette problématique). 

« Our findings highlight the urgent need for collaborative research between ecologists and electrical engineers to ensure that future developments in LED technology minimize their potential ecological effects.« 

Dans l’attente des publications en cours du laboratoire Laplace de l’Université Paul Sabatier, qui a étudié précisément l’impact des types de LEDs utilisées en éclairage public, nous pouvons mentionner leur étude sur les chauves souris ( dont 30% ont disparu depuis les années 2000).